Tout un programme


Quand je lis le livre de Ségolène Royal  (Lettre à tous les résignés et indignés.. Plon),  j’ai bien envie encore une  fois de lui dire merci. Merci, pas tant pour moi, mais pour nous tous, pour beaucoup de nous en tout cas, pour nous livrer ses visions et ses propositions qui oeuvrent pour notre collectivité. Pas tant pour moi, qui ne suis ni résignée ni indignée; enfin pas trop, mon rapport au monde s’éclairant d’une logique de la causalité et de la responsabilité plutôt que des affects, même si bien sûr le réel du monde est bien souvent insupportable, et c’est plutôt alors la colère qui m’habite.

Cette lettre est vraiment un programme, un contrat social et moral, un pacte : « engagement social-écologique » (25), « responsabilité personnelle liée aux solidarités collectives (13), « socialisme de transformation » (51), parité, séparation des pouvoirs, cercles vertueux (75), « Etat anticipateur » (82), « efficacité de l’action publique », j’en passe.  D’une grande cohérence comme le note M. Mazerolles sur BFM TV dans un édito. assez louangeur! ( voir BFM TV ou Segorama).

Ségolène Royal va vers la vie toujours. Elle n’est jamais aussi belle, aussi simple, aussi vraie  et aussi vivante que lorsque, comme souvent, elle se mélange aux autres, aux gens, aux français, là ou là, banlieues, paysans, ouvriers, écoles..voir l’article du Monde, et sa scéance de dédicace à Noisy-le-Grand . Tout le contraire d’une icône! En grande politique, elle veut que ça marche, elle croit que ça marche, elle va faire que ça marche. Résolument campée contre la pulsion de mort, elle pense que les conditions socio-économiques et politiques sont à même de traiter les symptômes individuels. Tant mieux, elle est à sa bonne place. 

 Toute question de l’Altérité humaine, de son accueil ou de son rejet doit être traitée en tant que telle (j’entends par là certains domaines, qui ne me paraissent pas mineurs bien loin  de là: psychiatrie, soins, prisons, conditions des immigrés, des étrangers). C’est nécessaire pour venir rompre avec l’idéologie sécuritaire et discriminante qui s’installe, et ouvrir la voie vers un profond changement dans le rapport aux autres. Les propositions concernant les jeunes en difficulté, en errance, (que je connais bien) doivent elles aussi être considérées comme centrale, d’autant que cette question de la jeunesse et de son malaise est un révélateur essentiel des dégâts de notre monde. voir « Cette jeunesse, notre symptôme ».

Segolène Royal  veut lutter contre « le désenchantement », pour le progrès social, « contre tous les désordres/ qui sont autant de violences destructrices » (p. 73) et elle a bien raison. Nous  oeuvrons aussi dans nos cabinets, institutions, associations, à ce que un par un, chaque être souffrant puisse se déprendre de cette mauvaise part qui lui vient de l’Autre, et inventer sa vie au plus près de ses choix. Le désordre étant nécessaire, et souvent incontournable,  il produit aussi de la crise, pour aller vers une « métamorphose ».

Cet « ordre juste ne s’oppose pas au mouvement », voilà qui est clair. Ce n’est pas un ordre figé, une statue du commandeur, c’est un lieu qui doit pouvoir s’articuler à l’invention, à l' »entreprise » dit-elle,aux « forces de la créativité », du « sur-mesure ». Beau Programme! Belle cohérence! Belle logique!